Hung Vu’o’ng XVIII, premier roi connu du Vietnam, avait une fille unique qui s’appelait Mi Nu’o’ng, belle comme une fleur, et d’un doux caractère. Le roi l’aimait beaucoup et voulait choisir pour elle un beau parti. Des jeunes vinrent pour demander la main de la princesse. Il y en avait un qui habitait le Mont Tan Viên et doté d’un pouvoir magique : S’il levait la main vers l’ouest, là s’élevait une chaine de montagnes. On le nommait Dieu des Montagnes ! Un autre, habitant de la mer, n’était pas moins talentueux. Quand il appelait le vent, le vent se levait, quand il criait à la pluie, la pluie survenait. On le nommait Dieu de la Mer. L’un était empereur des régions montagneuses et l’autre était monarque des étendues marines. Tous les deux seraient de bons gendres pour le Roi Hung. Ce dernier était dans l’embarras du choix et il fit venir les hauts dignitaires de la cour afin de délibérer. A la fin, il décida :
- Vous êtes, dit-il, dignes l’un comme l’autre, d’être mon gendre. Seulement, je n’ai qu’une fille, je ne puis satisfaire votre demande à tous les deux ! Je vous propose une solution que voici : demain, celui qui arrivera le premier pour m’apporter ses présents de mariage obtiendra la main de ma fille. Tous les deux demandèrent au Roi quels seraient les présents.
- Il me faut, leur répondit-il, cent jarres de riz gluant, cent paires de gâteaux de riz gluant, et puis une paire d’éléphants à neuf paires de défenses, une paire de coqs à neuf paires d’ergots, une paire de chevaux de couleur rose à neuf nuances.
Le lendemain de bonne heure, le Dieu des montagnes se présenta avec tous les présents exigés et obtint d’emmener Mi Nu’o’ng, dans la jungle.
Le Dieu de la mer, arrivé en retard, ne voyant plus la princesse entra en colère et lança ses troupes à la poursuite de son rival. Il appela la pluie et le vent qui, faisant trembler le ciel et la terre, élevèrent le niveau d’eau des fleuves pour faire la guerre au Dieu des montagnes. L’eau inonda les plaines, les habitations et arriva jusqu’aux versants des collines et des montagnes de l’enceinte de Phong Châu submergée, comme sous l’eau d’une véritable mer. Le Dieu des montagnes ne déclara pas forfait. Comme par miracle, il amoncela des collines et des montagnes en un rempart de terre pour arrêter l’eau. Plus l’eau montait, plus la terre des collines et des montagnes s’élevait. La lutte dura plusieurs mois. Enfin, le Dieu des montagnes tenant bon, le Dieu de la mer à qui la force manquait, se résigna à se replier.
De cette grande querelle, chaque année le Dieu de la mer déchaine la pluie et vent pour livrer bataille au Dieu des montagnes, mais après maintes reprises, doit se retirer. La mousson ne serait-elle qu’une histoire d’amour ?